Selon Statistique Canada, 55 % des femmes à l’âge de la ménopause sont en embonpoint ou obèses. De plus, près de trois Québécoises sur quatre souhaitent entreprendre un régime pour perdre du poids, révèle le sondage Canadian Women’s Attitudes Towards Weight. Mais perdre du poids rime-t-il nécessairement avec bénéfices pour la santé lors de la ménopause? Ahmed Ghachem s’est penché sur la question dans le cadre de ses études de doctorat à l’Université de Sherbrooke. Ses travaux, qu’il a menés en collaboration avec des chercheurs de l’Université d’Ottawa et de l’Université de Montréal, nous apprennent que ça n’est pas toujours le cas!
La ménopause : une combinaison de changements néfastes pour la santé
La ménopause est associée à plusieurs changements hormonaux, corporels et métaboliques, tels que l’augmentation des concentrations de lipides dans le sang et l’accumulation de graisse autour de la taille. Conséquences : les femmes gagnent en moyenne 2 à 4 kg au cours de cette transition. Ces changements augmentent aussi le risque de développer le syndrome métabolique, qui n’est pas une maladie en soi, mais plutôt la combinaison d’au moins trois facteurs parmi les suivants : tension artérielle élevée, taux élevés de triglycérides et de sucre dans le sang, faible taux de bons transporteurs du cholestérol et embonpoint abdominal. Ce syndrome touche davantage les personnes vieillissantes, dont les femmes ménopausées, et augmente le risque de développer le diabète de type 2 et des maladies cardiovasculaires. Cela s’explique en partie par la diminution en œstrogènes, une hormone qui joue un rôle protecteur sur la composition corporelle.
Régime : perte de poids, mais pas forcément de bénéfices pour la santé!
Quoi de mieux qu’un régime pour perdre les kilos qui s’accumulent à la ménopause? Les professionnels de la santé estiment que, pour les personnes en embonpoint, une perte de poids de 5 à 10% générera des bénéfices sur la santé. Bien souvent, les approches nutritionnelles visant la perte de poids encouragent la diminution des calories. L’étude d’Ahmed Ghachem et de ses collaborateurs démontre cependant que cette stratégie n’est pas toujours optimale!
L’équipe de chercheurs a suivi 73 femmes ménopausées, dont 20 avaient le syndrome métabolique. Elles ont adopté un régime visant la diminution des calories pendant six mois. À la suite du régime, les femmes avaient perdu en moyenne près de 7 % de leur poids et 5 kg de masse grasse. Le syndrome métabolique avait aussi disparu chez 60 % des femmes. Le régime a donc engendré une « perte de poids santé » chez ces femmes. Cependant, 8 femmes l’avaient encore après le régime et, pire, 6 femmes qui ne l’avaient pas l’ont développé malgré la perte de poids! Alors, comment expliquer cette détérioration du profil de santé malgré l’amélioration de la composition corporelle?
Diminution de la dépense énergétique totale : une piste à creuser
Des analyses complémentaires ont été réalisées afin d’essayer de mieux comprendre les raisons de la détérioration du profil de santé chez ces femmes. L’équipe de chercheurs a observé une diminution importante de la dépense énergétique totale quotidienne chez les femmes qui avaient développé le syndrome métabolique ou qui l’avaient encore, et ce, malgré la perte de poids. Autrement dit, ces résultats suggèrent que le régime hypocalorique permet une « perte de poids santé » pour la majorité des individus, mais pas pour tout le monde, encore moins pour ceux dont la dépense énergétique totale quotidienne diminue.
Ainsi, diminuer ses calories, bien qu’associé à une perte de poids et de masse grasse, ne s’accompagne pas d’une amélioration du profil de santé chez toutes les femmes ménopausées… de quoi remettre en question la notion de « perte de poids santé » !
Thomas Deshayes
Étudiant au doctorat en science de l’activité physique, Université de Sherbrooke
Ce texte a été produit dans le cadre du concours de vulgarisation scientifique 2018 de l’Université de Sherbrooke
À propos de Thomas Deshayes
Thomas Deshayes termine une maîtrise en sciences de l’activité physique pendant laquelle il a étudié la faisabilité et les impacts de l’exercice pendant le traitement d’hémodialyse chez des patients âgés atteints d’insuffisance rénale. Il entamera dès l’hiver prochain un doctorat en sciences de l’activité physique. Ses travaux porteront sur l’hydratation et le vieillissement dans un contexte d’exercice. Il souhaite contribuer à l’avancée des connaissances dans le domaine du vieillissement physiquement actif, mais surtout transférer les connaissances à la population pour qu’elle en fasse une application concrète.
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